vendredi 26 janvier 2018

La Sanction, de Trevanian


Officiellement, Jonathan Hemlock est professeur d'art à l'université et un alpiniste dont les exploits sont connus dans le monde entier. Officieusement, Jonathan tue des gens pour le compte d'une branche obscure des services secrets américains, en pleine période de guerre froide. Un travail bien payé qui lui permet d'enrichir sa collection de tableaux prestigieux, et de rénover son église. Car Jonathan vit dans une église transformée petit à petit en appartement de luxe. L'alpinisme et les services secrets: deux univers normalement bien distincts qui vont finir par se rejoindre dans le cadre de la dernière mission de Jonathan: sa prochaine cible va participer à l'ascension de la face nord de l'Eiger, l'une des plus périlleuses montagnes des Alpes suisses. Jonathan se joint à l'expédition pour pouvoir sanctionner la cible. 

Mais il y a un hic, un gros hic: le tueur ignore lequel de ses trois compagnons de cordée est la cible. Jonathan devra choisir entre un français, un allemand, et un autrichien. Premier roman du légendaire et mystérieux Trevanian, La Sanction n'est pas un roman d'espionnage au sens strict du terme. C'est plutôt un pastiche de roman d'espionnage à l'humour décapant, et surtout un roman à suspense captivant. Trevanian signe vraiment un livre très original tant par son intrigue que par son style, tant sur le fond que sur la forme. L'auteur fait la part belle aux comportements humains et aux scènes d'alpinisme spectaculaires. L'atmosphère du roman est vraiment singulière, surprenante. Je me permets de citer une phrase de l'auteur à propos de sa façon de raconter l'histoire: "un vigoureux sens de l'humour et l’œil pour le ridicule et la prétention des comportements humains, un humour qui relève du rire glacial d'un esprit en colère, pas du rire chaud et affectueux d'un humour doux". 

Effectivement, Trevanian est un auteur qui ne nourrit plus aucune illusion sur ses semblables, et ça se voit dans ce roman qui met en scène certains personnages peu flatteurs pour notre espèce, c'est le moins que l'on puisse dire. Je fais référence notamment aux "oiseaux de l'Eiger, qui n'allaient pas tarder à s'abattre sur l'hôtel. Comme tous les alpinistes, Jonathan détestait ces membres de la jet-set amateurs de sensations qui cherchent à titiller leurs nerfs insensibles en vivant les sensations des autres." Le peuple suisse en prend également pour son grade: "... un peuple vénal, taciturne, religieux, vénal, indépendant, organisé et vénal." Bref, vous l'aurez compris, si vous aimez les romans à l'humour irrévérencieux et féroce, La Sanction vous fera passer un très bon moment.

La Sanction séduit également par la personnalité de Jonathan Hemlock. Un individu arrogant, prétentieux, méprisant, et totalement insensible, mais qui va petit à petit s'humaniser, surtout dans le dernier tiers du roman. Une personnalité complexe et intéressante, qui cache finalement des émotions sous une carapace difficile à percer. Ensuite, ce roman palpitant séduit par l'originalité de son intrigue, pleine de suspense, avec notamment un ultime rebondissement qui surgit dans les dernières pages du livre. La surprise du chef. Enfin, La Sanction est une critique subtile et intelligente des politiques étrangères américaine et soviétique, à l'époque de la guerre froide. Bref, La Sanction est un polar culte, incontournable, écrit dans un style sophistiqué, plein de panache. Une plongée fascinante dans le monde de l'alpinisme, et dans les méandres tortueux de la psychologie humaine. Adapté au cinéma par un certain ... Clint Eastwood.  

Trevanian, La Sanction, Gallmeister, 336 pages, traduit de l'anglais (Etats-Unis) par Jean Rosenthal, sorti en 1972 (Etats-Unis) 1975 (France)

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1 commentaire:

  1. Je vois que ça vit bien ton blog Pietro !
    A bientôt l'ami !
    Ivan le colombien !

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