vendredi 15 avril 2016

Mala Vida, de Marc Fernandez


"Il lui manque cependant un élément essentiel, une pièce du puzzle qu'il n'a pas encore: le mobile. Pourquoi voler des enfants? Pour le compte de qui? Pour en faire quoi? Il n'ose imaginer que c'est uniquement pour l'argent." Rassurez-vous, en citant cette phrase du livre, je ne dévoile pas grand chose de l'intrigue du premier roman de Marc Fernandez. Car dans Mala Vida, le lecteur entre très rapidement dans le vif du sujet. Un odieux trafic de bébés volés a vu le jour sous la dictature franquiste. Plus horrible encore, ce trafic a même continué longtemps après la mort du général Franco.

Le problème, c'est qu'en Espagne, on n'aime pas parler de l'époque douloureuse de Franco. C'est une plaie fermée à double tour qu'on ne veut surtout pas ouvrir. Malgré ce traumastisme collectif qui s'est mué en omerta, la droite dure revient quand même  au pouvoir dans le pays, après douze ans de socialisme. La faute à la crise économique qui frappe l'Espagne de plein fouet. Il ne manquait plus que le scandale des bébés volés pour ébranler un édifice déjà bien fragile. Et pendant ce temps, des citoyens en apparence ordinaires sont assassinés par une personne qui semble mener une vendetta pure et simple. 

Pour son premier roman, Marc Fernandez mêle habilement histoire, roman noir, et thriller politique. C'est tout un pan peu reluisant de l'histoire récente de l'Espagne qui est dévoilé dans ce roman sombre et captivant. Mala Vida est une histoire tragique mettant en scène des personnages fébriles, qui nagent dans les eaux troubles du fascisme et du fanatisme religieux. L'intrigue est taillée au couteau, tendue comme un fil de rasoir. 

Sur la forme, c'est un premier roman, et donc il y a quelques maladresses d'écriture, et les personnages manquent un peu d'épaisseur. Mais l'impression d'ensemble est largement positive. Le style de Marc Fernandez est simple, sec, télégraphique. Une écriture de journaliste qui va à l'essentiel. J'ai aimé! Il n'y a pas de gras, pas de fioritures. Mala Vida, c'est dur, c'est tendu, c'est bien mené, et surtout c'est un thriller politique et historique qui met au jour une vérité franchement sordide. 

Marc Fernandez, Mala Vida, Préludes, 288 pages, sorti en 2015.

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