jeudi 15 octobre 2015

L'enfer de Church Street, de Jake Hinkson


Ce que j'ai aimé dans ce livre avant tout, c'est que l'auteur nous fait entrer immédiatement dans le vif du sujet, droit au but. C'est vif, c'est nerveux, c'est direct, tout de suite, dès les premières pages. Et ensuite, il n'y a plus qu'à dérouler, jusqu'à la fin qu'on ne voit même pas venir, tellement on est littéralement scotchés par cette histoire. Celle de Geoffrey Webb, l'aumônier, en apparence inoffensif, d'une petite ville de l'Arkansas. Pour son premier roman, noir comme le cauchemar, Jake Hinkson frappe très fort. A travers la terrifiante confession de son personnage central Webb, ce jeune auteur met littéralement en pièces le rêve américain: critique acerbe de la religion quand celle-ci n'est finalement qu'un business comme les autres, mais surtout constat sans concession de l'hypocrisie et de la violence qui peuvent régner au sein d'une petite ville de l'Upper South américain. Il faut que je revienne également sur le style d'écriture de l'auteur, qui sait raconter une histoire, et captiver son lecteur. Car il fallait un sacré souffle pour écrire cette histoire, qui sent la poudre et l'atmosphère viciée d'une petite ville de l'Amérique profonde. Le style est simple, alerte, incisif, le récit est fluide, sans temps mort, composé de chapitres courts. On pense à Jim Thompson, Larry Brown, ou plus récemment Daniel Woodrell.

Oui, la noirceur prédomine, aucun doute là-dessus, mais l'auteur a su aussi insuffler à son récit de l'humanité, de la compassion, voire même une certaine empathie. Avec une pointe d'humour... bien cynique. Pourtant son personnage est une vraie pourriture, un psychopathe de la pire espèce, le diable au milieu des soi-disant vertueux. Mais bien sûr, dans la vie tout n'est pas blanc d'un côté, et noir de l'autre. Geoffrey Webb ne peut pas susciter que de la haine, ou du dégoût. C'en est destabilisant, dérangeant même, ça remue des choses en nous lecteurs. Mais c'est ça qui est bon finalement, car si on ne ressent rien à la lecture d'un livre, ce n'est même pas la peine de continuer. Et Hinkson parvient à nous transmettre beaucoup d'émotions. Un écrivain de talent, très prometteur. 

Jake Hinkson, L'enfer de Church Street, Gallmeister, 240 pages, traduit de l'anglais (Etats-Unis) par Sophie Aslanides, sorti en 2012 (Etats-Unis) 2015 (France)

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