jeudi 1 juin 2017

Morituri, de Yasmina Khadra


Yasmina Khadra est le pseudonyme littéraire de Mohammed Moulessehoul, le plus célèbre auteur algérien de polars. En réalité, ce sont les deux prénoms de son épouse. Un hommage vibrant de l'auteur à celle qui l'a soutenu dans sa carrière mouvementée d'écrivain dénonçant un pays qui n'admet aucune contestation. Mais aussi, une volonté affichée de soutenir l'émancipation de la femme musulmane. 

Autant vous dire que l'auteur et toute sa famille ont dû rapidement quitter le pays après la parution des premières enquêtes de son célèbre inspecteur Llob. Sorte de double littéraire de l'auteur, véritable bombe humaine au service de la vérité, un homme intègre, honnête, bref un ovni dans le paysage policier algérien. Un univers corrompu, comme ce n'est pas permis ! 

Morituri est l'un des sommets de cette série noire, très noire. Inutile de vous décrire dans le détail l'intrigue, tournant autour de la disparition de la fille d'un ancien homme politique. Une affaire sordide, tordue, qui va conduire le pauvre inspecteur Llob jusqu'aux plus hautes sphères de l'état algérien. Dans les enquêtes du commissaire Llob, il s'agit moins pour Yasmina Khadra de trouver les criminels, que de se livrer à un examen sans concession d'un pays gouverné par la mafia politico-financière, et gangrené par des organisations fanatiques qui éliminent les intellectuels et les opposants ua régime totalitaire et intégriste. Sans parler de la misère, la corruption, les injustices, et les inégalités sociales.

Au final, Morituri séduit par la personnalité du commissaire Llob, qui fait tout son possible pour rester droit (et ce n'est pas facile, loin de là), mais qui ne nourrit plus aucune illusion sur son pays. Une sorte de dernier rempart fragile contre la barbarie. Ce roman noir séduit par le style d'écriture très riche de l'auteur. Un style à la fois acéré et poétique. Une poésie bien triste, d'une désespérante noirceur que ne vient éclairer aucune lueur d'espoir !

Yasmina Khadra, Morituri, Folio, 192 pages, sorti en 1997.

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