mardi 15 août 2017

Captifs, de Kevin Brooks


"Je ne me sentais pas trop mal, mais je n'étais pas assez en forme pour faire grand-chose. Pas assez en forme pour expliquer au gros banlieusard qu'il avait été emprisonné dans un bunker souterrain par un homme inconnu aux intentions inconnues, qu'il n'y avait absolument aucune issue, rien à faire, aucune intimité, aucune vie, aucun espoir, aucun ... RIEN. Que nous pouvions très bien tous rester là des années...
Nous pouvons rester là des années.
Non, je ne me sentais pas la force de lui expliquer tout ça."

Le décor est planté: un adolescent qui vivait dans la rue après avoir quitté le domicile parental, une petite fille, un drogué, un vieil homme borgne et en fin de vie, un homme d'affaire obèse et alcoolique, et une jeune femme qui se demande bien pourquoi elle a atterri dans cet endroit terrifiant. Et un psychopathe, qui les surveille, à l'aide de micros et de caméras fixés au plafond. Et qui les tue à petit feu. Implacable, impitoyable. Captifs est le journal intime de Linus, l'adolescent, qui nous raconte sa vie et celle des autres, à l'intérieur du Bunker. De ce fait, le style d'écriture est économe, concis, dépouillé, et reflète l'évolution psychologique de l'adolescent, qui perd de plus en plus pied au fil des jours qui passent dans ce lieu abominable. D'ailleurs le titre anglais de ce roman éprouvant est The Bunker Diary: le journal du Bunker. 

A sa sortie, Captifs a fait l'objet de nombreuses critiques suscitées par son nihilisme absolu. En effet, je préfère vous prévenir tout de suite: ne cherchez pas d'explications à ce livre, il n'y en a pas. Ne reste que la cruauté humaine, le pire du pire. Si vous avez actuellement le moral dans les chaussettes, surtout n'ouvrez pas ce roman noir, très noir. Plus qu'un livre, une expérience troublante, éprouvante, choquante, un chant funèbre sur un monde de démence et de sang. Une plongée dans l'horreur à l'état pur, racontée avec les mots d'un adolescent sensible, qui ne veut pas perdre espoir, du moins au début. 

Captifs appartient à ces romans qui privilégient la dureté des rapports humains et les atmosphères très sombres et qui, se faisant, se distinguent des purs romans criminels. Et il faut avoir l'estomac bien accroché pour lire cette histoire affreuse au final cauchemardesque, et controversé. Préparez-vous bien, car pendant quelques heures, vous aurez vraiment l'impression d'y être dans ce bunker, aux côtés de Linus. J'ai dévoré ce livre de bout en bout, totalement embarqué dans cette histoire prenante, haletante, racontée par un auteur talentueux qui sait captiver son public. Mais je peux comprendre que ce livre choc divise l'opinion, parce que la noirceur qui s'en dégage est totalement sans espoir. Bon moi je vais de ce pas m'acheter un Nadine Monfils histoire de garder mon moral au beau fixe !  

Kevin Brooks, Captifs, 10/18, 287 pages, traduit de l'anglais par Marie Hermet, 2013 (Angleterre) 2016 (France)

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