mercredi 19 octobre 2016

Ville noire ville blanche, de Richard Price


Ville noire ville blanche appartient à cette catégorie de romans qui mettent l'accent sur la critique sociale. L'intrigue criminelle est quand même présente: New York dans les années 90, une jeune femme blanche arrive totalement en état de choc dans un hôpital, et raconte que sa voiture a été volée. En apparence, une agression banale comme il en survient malheureusement tous les jours dans une banlieue new-yorkaise en proie à la misère et à la violence. Sauf que dans la voiture, il y avait aussi le petit garçon de cette jeune femme blanche. Et comme si ça ne suffisait pas, celle-ci affirme que l'agresseur était noir. De quoi exacerber des tensions déjà bien présentes entre les communautés. Mais pour corser le tout, l'inspecteur en charge de l'enquête se rend vite compte que la jeune femme ne dit pas toute la vérité. Son récit comporte de nombreuses incohérences. 

Ce que l'inspecteur va découvrir, c'est une bien triste réalité, un chant funèbre sur un pays qui n'a toujours pas réglé ses problèmes sociaux. Vous l'aurez compris, l'intrigue sert de prétexte au grand Richard Price pour dresser un constat réaliste, et surtout sans concession sur les problèmes des banlieues en Amérique. Racisme, misère, pauvreté, violence, inégalités sociales: un cocktail empoisonné qui a notamment conduit aux tristement célèbres émeutes de Los Angeles en 1992. Avec comme déclencheur l'acquittement des policiers accusés d'avoir passé à tabac le noir Rodney King, après une course-poursuite pour excès de vitesse. Dans Ville noire ville blanche, l'action se déroule dans la banlieue de New York, mais les problèmes sont les mêmes qu'à Los Angeles. Et le déclencheur, c'est l'agression d'une jeune mère de famille blanche par un homme noir. 

Ville noire ville blanche est donc un roman très sombre, qui dévoile une réalité déchirante, et qui dégage une grande puissance: une intrigue taillée au couteau, des personnages forts et surtout réalistes, une écriture sèche, nerveuse, impitoyable. Un roman urbain engagé, tendu, dénonçant le racisme et les inégalités sociales qui gangrènent une société communautariste. Un véritable cri d'alarme poussé par l'auteur. Ville noire ville blanche est désormais un classique incontournable du roman noir qui confirme tout le talent de Richard Price pour raconter des histoires fortes, engagées, et profondément ancrées dans la réalité sociale des banlieues américaines. Un chef d'oeuvre incontesté de la littérature américaine.

Richard Price, Ville noire ville blanche, 10/18, 624 pages, traduit de l'anglais (Etats-Unis) par Jacques Martinache, sorti en 1998 (Etats-Unis et France)

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