"Il étouffe face aux trois hommes, lorsque Hoover poursuit:
- Clark, aimez-vous notre pays ?
- Oui, monsieur.
- Vous n'allez donc pas me décevoir, vous aussi ?
- Non, monsieur.
- Bien. Votre bureau est désormais en alerte. Oubliez la mafia et concentrez-vous sur le BPP. Les détails de votre mission sont dans le dossier.
- Merci, monsieur.
- Ne me remerciez pas, Cointelpro n'a rien d'un cadeau. Toutefois, en cas de succès, il vous vaudra une promotion. En dernière page du dossier, vous trouverez la liste de nos objectifs: les fondateurs Bobby Stills et Huey Norton, le rédacteur en chef du journal, Eldridge Glazer, et enfin Fred Carlson. Ce dernier dirige la cellule de Chicago, très active. Carlson est votre cible.
"Cible" - le mot a été prononcé. Dès lors, Clark comprend que le boss fera tout pour gagner ce que sera sans doute sa dernière guerre. FBI vs BPP. White America vs Black Power.
Clark referme le dossier, Sullivan lui tapote l'épaule, Tolson écrase sa cigarette et l'histoire peut enfin commencer.
Let's Rock."
Je confirme, il y a beaucoup de musique dans ce roman noir historique qui sent la poudre et l'atmosphère viciée d'une Amérique des sixties désemparée, chaotique, au seuil de l'apocalypse. Power est un chant funèbre sur un monde de démence et de sang. Michaël Mention a trempé une fois de plus sa plume dans l'acide, et dresse le portrait au vitriol d'un pays miné par le racisme, les inégalités sociales et la guerre du Vietnam.
Plus précisément, l'auteur revient sur la création du célèbre Black Panther Party, cette organisation née dans le ghetto et pour le ghetto. Un mouvement qui va prendre une ampleur considérable, pas seulement en Amérique d'ailleurs, mais dans le monde entier. Le gouvernement américain, et notamment le FBI de J. Edgar Hoover, vont tout faire pour éradiquer cette organisation. Et tous les coups sont permis, oui tous les coups, la manipulation, la cruauté, et surtout la violence seront sans limites.
Je préfère vous prévenir, âmes sensibles, abstenez-vous d'ouvrir ce livre, certaines scènes sont à la limite du supportable. On est clairement dans le domaine du roman noir comme le cauchemar. D'un réalisme terrifiant. Power est une fresque épique et violente, sans concession, il fallait un sacré souffle pour livrer ce récit crépusculaire, qui s'appuie sur un solide fond documentaire. Le style d'écriture moderne, novateur, plein de punch de l'auteur fait le reste !
Au final, Power est un roman éprouvant, fiévreux, incandescent, c'est une histoire puissante mettant en scène trois personnages que vous ne serez pas près d'oublier, croyez-moi: Neil, le policier du ghetto, qui sombrera peu à peu dans une folie raciste et meurtrière; Charlene, l'adolescente du ghetto, qui deviendra une militante acharnée; et Tyrone, le délinquant du ghetto, qui infiltrera le Black Panther Party pour le compte du FBI. Trois écorchés vifs de la vie englués dans une époque cauchemardesque. On est très très loin de l'Amérique peace and love !
Michaël Mention, Power, 10/18, 504 pages, sorti en 2018.
Du même auteur sur ce blog:
Sale temps pour le pays ; ... Et justice pour tous ; Le carnaval des hyènes ; Manhattan Chaos ; Bienvenue à Cotton's Warwick ; Les Gentils
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